"Tant que les lions n’auront pas d’histoire, les histoires de chasse seront toujours
à la gloire des chasseurs."

Proverbe africain

Principes (rappel) : sans confrontation point de tangence.

Au fil de cette série de spectacles, nous proposons à des artistes ou des penseurs bien réels venant d'horizons divers d'être l'élément moteur dans l'élaboration d'une proposition théâtrale, entre autobiographie et autofiction.
Une bulle gonflable transparente est donnée comme espace de création, à la fois cocon, loupe, lieu de projection physique et mentale. À chacun de trouver une forme cohérente, un type de relation au public, pour faire partager les expériences qui l'ont constitué en tant qu'artiste. Au fil des rencontres, nous fabriquons, de notre côté, un prototype d'artiste tangent. Ce personnage récurrent inscrit son parcours fictif dans les différentes biographies dont il se nourrit.


Tranche 2, Hubertus Biermann

Après le cinéaste Boris Lehman, c'est en compagnie d'Hubertus Biermann, cycliste, comédien et musicien, que nous abordons la deuxième tranche. Nous chercherons avec lui et Natascha Rudolf, qui l'a mis en scène dans La contrebasse de Süskind, une forme spectaculaire pour revisiter son parcours d'artiste, entre le rock'n roll et Kurt Schwitters, John Cage et Arno Schmidt.



A- H. Biermann dans la bulle avec sa contrebasse, devant lui Iks (CCAM Scène Nationale de Vandoeuvre, Mars 2013) ©Association Arsène
B- Hubertus Biermann dans la bulle ©Association Arsène
C- Hubertus Biermann et Dominique Répécaud à vélo "Il y a beaucoup de champignons par ici?" (Image extraite d'une vidéo) ©Association Arsène

Extrait de "Nous ne pouvons connaître le goût de l'ananas par le récit des voyageurs, tranche 2" :

Synopsis: Un peu avant et pendant l'entrée du public, Hubertus Biermann est dans la bulle gonflable et interprète Vexations d'Erik Satie à la contrebasse (retransmission dans le hall).

Introduction (Explication du protocole): En référence et en hommage à John Cage, le nombre de séquences de 4'33'' qui composeront le spectacle est tiré au sort (11). Entre chaque séquence, un interlude.

    1. Ananas-projet : croiser les expériences, trouver comment pouvoir les partager. Iks (le personnage fictif) lance un appel à témoin (Retrouver les morceaux de la robe de Yoko Ono).
Interlude : Iks parle de son travail avec B. Lehman : la conversation comme geste artistique. Acquérir une méthose :

   2. Se présenter le temps d'un trajet d'ascenseur : le CV comme degré zéro d'autofiction (Hubertus, Natascha & Iks)
Inter : arrivée en France : découverte du théâtre

   3. Poésie sonore (Kurt Schwitters, et AAA) : l'énergie de la parole, la musique de la langue.
Inter : La recette de l'Hawaï toast et les fiches prescriptives de Yoko Ono

   4. Reconstitution d'une conversation avec Hubertus : haine de la musique.
Inter : Le rock et le rapport au père. Schubert sur un tandem

   5. John Cage, 4'33'' de silence, interprété par Hubertus
Inter : Roaratorio à l'Ircam : un choc, comme l'écriture d'A. Schmidt

   6. Arno Schmidt : Piporakemes (extrait)
Inter : Hubertus et Natascha : leur travail en commun :

   7. SBO de Schmidt (la page/contexte politique départ d'Allemagne…)
Inter : Rencontres entre Ikset Cage : l'interview filmé

   8 Cage : conférence sur rien, par Hubertus
Iks(O) Inter 8 : Tudor/contrepoint

   9. Duchamp (voix de Duchamp à la radio : le ready-made)
Reconstitution par Michel de La roue de bicyclette

   10. Cage : Water walk (reconstitution en direct)

   11. Vidéo : Hubertus, Dom à Vélo
Chanson (Iks, Hubertus et Natascha) : The National+feu de camp dans la télé+bûche Michel

   SALUT
Sortie public (Satie diffusé dans le hall)…


Extrait du texte: Comment se présenter en 30''

MICHEL : Imaginez que vous êtes dans un ascenseur et que vous avez 30'' pour vous présenter.
Dites-moi Hubertus Biermann, je vous ai remarqué à la dernière réunion, vous avez un parcours atypique, non ?


H. BIERMANN : Je viens de la Ruhr, je suis arrivé en France dans les années 70… A 15, 16 ans j'étais destiné à disparaître à l'usine…Mon père était ouvrier métallurgiste, il dirigeait l'harmonie municipale, un héritage de mon grand-père, une fanfare quoi, un orchestre pour faire danser les gens aux mariages. A cette époque se sont ouvertes des écoles qui permettaient aux retardataires de la classe ouvrière, aux paysans, de faire le bac ; c'était pas un bac au rabais, et c'était à presque 50 km de chez moi, il fallait que je me lève comme les ouvriers à 5 heures du matin, pour prendre le vélo aller à la gare, et il fallait rentrer après, et ça durait 4 ou 5 ans, je me suis accroché, pour finalement une fois le bac, c'était 68, les universités ça ne travaillait plus, moi j'étais complétement paumé, et je suis redevenu pour presque deux ans ouvrier chez Opel, j'avais besoin d'argent, on m'a proposé du bon travail, et là j'ai fait quand même un peu des études de littérature, à la fac, de philosophie, et j'ai rencontré un milieu d'anarchistes gauchistes et des musiciens que j'avais jamais imaginé à la maison il n'y avait pas de disque, pas de tourne-disque, mes parents étaient vraiment pauvres…
A 15, 16 ans j'étais destiné à disparaître à l'usine…


               Sonnerie/interruption

IKS : C'est court 30'' hein ?

H. BIERMANN : Schwitters est mort en 48 et moi, je suis né en 49 (l'année des premières bandes magnétiques).

IKS : C'est aussi le premier Festival Exprmntl à Knokke-le-Zoute… Concentre-toi sur l'essentiel

MICHEL : Dites-moi Hubertus Biermann, je vous ai remarqué à la dernière réunion, vous avez un parcours atypique, non ?

H. BIERMANN : Je suis né en 49, on n'avait pas de piano, pas de disque, je connaissais uniquement la radio et l'harmonie municipale et à 14 ans, je suis devenu musicien de rock au grand désespoir de mon père, j'étais très autodidacte, je jouais de la trompette, de la clarinette,et en regardant un peu les groupes passer j'ai très vite appris la guitare, un peu le rock tout seul plus ou moins bien, après je me suis mis à la basse électrique et la contrebasse, la première contrebasse que j'ai touchée physiquement ça a été le coup de foudre,
Ça m'aurait plu aussi de devenir bûcheron ou… je n'avais aucune ambition, je ne connaissais même pas mes véritables talents, même mes penchants étaient extrêmement vagues, c'était facile de trouver de l'argent à l'époque, si je voulais je travaillais ; les études me terrorisaient, je me sentais toujours déplacé dans les écoles, c'était pas pour moi et j'avais beaucoup de mal à accepter une autorité. La littérature, ça fait vraiment partie de moi comme… la littérature et mon instrument c'est plus nécessaire que de manger; je vendrais tout pour garder les livres qui comptent pour moi; je ne vendrais jamais un livre, jamais un instrument.
Depuis 35 ans je fais du vélo en Auvergne, je vais toujours sur les mêmes chemins, je sais où trouver les champignons, où dormir dans la forêt, l'ombre qui est là…












 "Nous ne pouvons connaître..."
 Tranche n°1, Boris Lehman
 Tranche n°3, Georges Appaix
 Tranche n°4, André S. Labarthe
 Tranche n°5, Vinciane Despret
 L'Art Tangent


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